Dr Lwiis Saliba Discours prononcé dans la Journée mondiale de la Non-Violence: Gandhi et la n violence dans le Monde Arabe

Dr Lwiis Saliba

Discours prononcé dans la Journée mondiale de la Non-Violence: Gandhi et la non violence dans le Monde Arabe, 2/10/2021

Ce discours est disponible sur Youtube sur le lien suivant:

Il me fait grand plaisir, de cette partie du monde encore embourbée dans les ténèbres de la violence, de saluer les participants et les méditants en cette heureuse occasion de l’anniversaire de la naissance du Mahatma Gandhi et de l’aube de la non-violence dans le monde moderne, un jour de l’année qui est transformé à juste titre en la Journée internationale de la non-violence.

Une région embourbée dans les ténèbres de la violence, ai je dis, mais c’est peut-être l’obscurité des ténèbres qui précède l’aube des lumières. Et les indices du début de l’émergence de cette aube dans notre vaste monde arabe sont nombreux. Le temps limité de cette intervention ne me permet pas de tout parcourir, je limiterai donc ma présentation aux plus importants, notamment dans trois pays, et aux leçons et implications qui peuvent en être tirées.

Comment les pays du monde arabe ont-ils interagi avec le message de non-violence, et les enseignements du Mahatma Gandhi et le modèle de lutte pacifique vivante qu’il a présenté, et quel effet a-t-il eu sur dans ce monde?

Le Gandhisme d’abord au Liban

Et le début était très probablement au Liban, ce petit pays par sa taille, qui se mesure souvent par la profondeur de son influence plutôt que par sa petite taille sur la carte. En 1927, l’écrivain libanais Omar Fakhoury a publié sa traduction de la biographie du Mahatma Gandhi, qui a été écrite par l’écrivain français et prix Nobel Romain Rolland et publiée à Paris en 1924. Ce fut le premier livre arabe publié sur Gandhi. Omar Fakhoury a été impressionné par le mouvement national que Gandhi a incarné à cette époque, et il a écrit un certain nombre d’articles sur ce sujet, et son admiration et son intérêt ont culminé en traduisant ce livre, et en le présentant comme un cadeau aux lecteurs de son magazine Al-Kashaf.

L’Égypte le pays arabe le plus influencé par Gandhi

L’Égypte, qui est le principal État arabe et qui s’est familiarisée avec le leadership du monde arabe dans sa lutte contre le colonialisme et dans sa renaissance, a eu la part la plus importante de la suivie du mouvement du Mahatma et de ses démarches, surtout que les deux pays: l’Inde et l’Égypte étaient unis par une même calamité: le colonialisme britannique.

En août 1931, Gandhi se rendait en Grande-Bretagne, représentant le parti du Congrès, pour participer au deuxième tour de la Table ronde, qui discuterait d’une solution à la situation en Inde. Son navire arriva de l’océan Indien, traversa le canal de Suez et fit escale à Port-Saïd. Le Mahatma voulait descendre du navire pour rencontrer les dirigeants égyptiens, mais les Anglais ne le lui permettaient pas, craignant l’impact de cette rencontre sur la situation en Egypte. Un certain nombre de dirigeants du parti égyptien du Wafd, dirigé par le chef du parti, Mustafa al-Nahhas, ainsi qu’un groupe de penseurs et d’écrivains, ont rencontré Gandhi sur le pont de son navire qui s’était arrêté à Port-Saïd. Mme Safiya, la veuve du leader national Saad Zaghloul, faisait partie des personnes accueillies en raison de l’amitié entre son défunt mari et Gandhi. L’un des membres de cette haute délégation égyptienne était le prince des poètes arabes de l’époque, Ahmad Shawqi (16/10/1868-14/10/1932). Il récita pour accueillir le Mahatma un poème puissant que les Egyptiens récitent encore à ce jour:

Enfants d’Egypte, élevez le laurier et saluez le héros de l’Inde

Votre frère dans l’épreuve de la situation grave

Et dans le grand sacrifice, dans l’exigence et dans l’effort

Et dans la blessure, et dans les larmes, et dans le bannissement du berceau

Et dans le cheminement vers la vérité, et dans le cheminement de la délégation

Saluez-le près de l’arche, et de loin

Et couvrez la terre de myrte, et couvrez la mer de roses

***

Sur la frise (Rajputan) se trouve une statue de gloire

Un prophète comme Confucuis, ou de cette époque

Plus proche en paroles et en actes du Mahdi attendu

Semblable aux Messagers dans la défense de la vérité et dans l’ascétisme

Il a enseigné avec vérité, patience et détermination

Et il appela l’Extrême-Orient, qui lui a répondu et se leva de sa tombe

Et il est venu aux âmes malades et les a guéries de la haine

 Il a appelé Les hindous et les musulmans à l’intimité et à l’amitié

Avec la magie des pouvoirs de l’âme, il a laissé les deux épées au fourreau

Et par la chance qui n’est donnée qu’à une créature née pour l’immortalité

***

Salutation du Nil, O Gandhi, et ces fleurs sont de moi

Et le respect des pyramides, de Karnak et du papyrus

Et du cheikh de la vallée, et de ses petits enfants

Salutation O trayeur de brebis, à celui qui a mis fin au monopole du sel

A celui qui a parcouru l’Inde à pieds

Paix à toi quand tu pries  moitié nu, dans la nuit

Et dans le coin de la prison et dans la chaîne des chaînes

****

De la table verte – fais attention, O Gandhi !

Soit le meilleur joueur aux échecs et aux dés

Et dis aux anglais: Apportez vos serpents, le conteneur est venu de l’Inde

Et ne sois pas piégé par le calomniateur, ni trompé par la louange

Au début de son poème, Shawqi se concentre sur le malheur colonial qui a rapproché Gandhi et l’Egypte: votre frère dans la souffrance (…) et dans les blessures et en exil… et au stade de la délégation, les pratiques des Britanniques, leur oppression et leur exil, c’est le même en Inde et en Egypte.

Cependant, ce grand pays ce jour-là était confus quant à la manière d’affronter un leader qui est plus proche d’un saint que d’un homme politique: son message et la sainteté de sa vie le rendaient semblable aux prophètes et aux messagers: un prophète comme Confucius… semblable aux messagers, jusqu’à ce qu’il devienne un sauveur attendu comme l’Imam Mahdi. Le Prince des Poètes s’arrête à ce qui suscite particulièrement la sensibilité égyptienne: son appel à l’intimité entre musulmans et hindous, une intimité qu’il souhaite entre musulmans et coptes en Egypte.

Shawki note avec enthousiasme et admiration les méthodes simples et distinctives du Mahatma pour affronter le colonialisme: préparer sa propre nourriture et donc boycotter les aliments fabriqués en Grande-Bretagne (la traite des brebis), filer ses propres vêtements, et ainsi boycotter les vêtements et les textiles fabriqués par les Anglais et leurs usines. Et la marche du sel qu’il a menée il y a peu de temps, et elle aurait mis fin au monopole colonial britannique sur cet aliment vital et sa fabrication. Il fait référence aux voyages de Gandhi à pied dans l’Inde de long en large pour unir la nation et sa parole et pour activer et revitaliser le mouvement pour affronter le colonialiste.

Il fait de la nudité de Gandhi, que les Britanniques ridiculisent, un honneur pour lui et pour l’Inde. Il l’avertit de leur ruse, et de leurs plans pour contrecarrer la conférence à laquelle il va participer. Gandhi d’ailleurs ne comptait pas beaucoup sur cette conférence, alors il déclara avant d’embarquer dans le port de Bombay le 29 août 1931 : «Toutes les conditions sont réunies pour que je revienne les mains vides» (Mosleh, op. cit, p253).

Peut-être que l’essentiel et l’image la plus belle dans le poème de Shawqi est ce tableau qu’il peint pour la prochaine conférence et pour le rôle de Gandhi dans celle-ci. Il compare les idées, propositions et manœuvres des colonialistes britanniques à des serpents qui s’efforcent de piquer ses participants, d’empoisonner leurs idées et de les confondre, tandis que le Mahatma est le conteneur indien, l’Inde d’ailleurs est célèbre pour ses conteneurs, un conteneur qui maitrise bien le dressement. des serpents.

Méditation: La poésie nous livre souvent des images et des scènes qui servent de support à la méditation. Nos pensées et émotions et les pensées et manœuvres des autres sont souvent des serpents cachés dans des paniers de roses. Nous ne pourrons pas éradiquer tous ces serpents, et la sagesse exige qu’on apprenne comment traiter, afin de les maitriser. Nous devons être aussi habiles qu’un conteneur, pour que  ces idées/serpents soient à notre service, au lieu de nous piquer et d’empoisonner nos pensées et nos esprits. De même que le conteneur fait dresser le serpent, on peut faire en sorte que les serpents des idées soient comme le serpent de la Kundalini et détournent leurs énergies de bas en haut pour qu’ils deviennent un pilier de notre développement, au lieu d’y rester un obstacle.

Méditons donc sur ça

3 livres sur Gandhi en 1934

Et une seconde escale en Egypte en 1934. Cette année-là, trois livres sur Gandhi sont publiés au Caire. Le premier est Mahatma Gandhi, sa biographie telle qu’il l’a écrite par lui-même, traduite par un écrivain égyptien progressiste, Ismail Mazhar (1891-1962). Le traducteur avait déjà publié cinq chapitres de ce livre dans le magazine Al-Muqtataf.

Et le deuxième livre, Gandhi et le mouvement indien (Musa, Salama, 1934), peut-être le premier livre sur Gandhi en arabe, l’auteur est le penseur égyptien de la Renaissance Salama Musa (1887-1958).

Le troisième livre a été écrit par un jeune homme qui deviendra ministre de la Culture après la révolution et à l’époque d’Abdel Nasser. Il s’agit de l’écrivain Fathi Radwan (1911-1988), et le titre de son livre est : «Mahatma Gandhi La vie et le Jihad”.

Ismail exprime son admiration totale pour la méthode pacifique de lutte de Gandhi contre le colonialisme britannique, et pour les résultats obtenus par cet homme sans défense face à la puissance militaire et coloniale la plus puissante de l’époque, il dit dans l’introduction: «Un empire où le soleil ne se couche pas sur ses possessions (…) établies et assises par un squelette humain. De sang et de chair il ne pesait plus qu’un boulet de canon des plus petits canons de Grande-Bretagne, et ce minuscule squelette humain était le grand Gandhi” (Gandhi , Biographie, op. cit, p. 7).

Et Mazhar d’ajouter, parlant du phénomène Gandhi, dont l’impact s’est étendu au-delà de l’Inde, pour atteindre toutes les parties de la terre: «Le corps mince de Gandhi n’est rien s’il est emprisonné entre quatre murs de pierre ou d’acier, tant que son âme vole dans le vaste ciel de la liberté, électrisant l’atmosphère de l’Orient, mais plutôt l’atmosphère du globe terrestre, pas l’atmosphère de l’Inde seule” (Gandhi, Biographie, op. cit., p. 8).

Quant à Salama Musa, dans l’introduction de son livre, il insiste sur la nécessité d’une interaction entre les deux mouvements indien et égyptien, et que chacun s’inspire de l’autre, étant donné la similitude des circonstances, et parce que le colonisateur est un. Pour cette même raison, nous devons être éclairés par leur mouvement comme ils ont été éclairés par le nôtre. Leurs dirigeants ont souvent évoqué l’union entre musulmans et coptes en Egypte, et ont appelé leur compatriotes musulmans et hindoues à faire de même en Inde. (Musa, Gandhi et le Mouvement, op. cit, p. 7).

Salama Musa met l’accent sur la nécessité de s’inspirer des aspects sociaux du mouvement de Gandhi, car c’est ce que la Renaissance égyptienne devrait développer en particulier, ne limita

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